• Ailleurs



    Ailleurs                                                                                           

    S’il est un chemin qui mène à la félicité, c’est bien celui qui conduisit mes pas hésitants vers le pays mystérieux, blanc et cotonneux d’où tu me faisais des signes joyeux et prometteurs. Région inaccessible toutefois, tellement rêvée, espérée, convoitée, magnifiée… Eden à nul autre pareil, sans équivalent dans la vraie vie, pas même sous l’effet de drogues interdites…

     

    Mais, toi-même appartenant au monde réel, te trouvais dans l’impossible, enraciné gentiment et raisonnablement dans le quotidien, et je dus poursuivre ma quête d’absolu, en solitude et désespérance, guettant d’autres signes, ailleurs, en d’autres temps…

     

    Si mon attirance pour le Beau déconcerte, c’est qu’elle s’accompagne d’un renoncement croissant et tenace, un renoncement à l’ordinaire, un renoncement à la compromission, à la tiédeur, un renoncement fatal : le renoncement à la Vie… Rompre le fil de ce petit ballon gonflé à l’hélium, casser le lien ténu et se laisser emporter vers d’autres rivages vierges d’hypocrisie et de faux-semblants, pour un autre univers, un monde sidéral, des îles intergalactiques…

     

    Liberté, liberté, illusion de la liberté, détachement de tout ce qui fait la satisfaction ordinaire : bouger, rire et se remplir de vanité, s’imaginer détenir l’autre en exclusivité. Partir, partir avec légèreté, sans chaîne, sans questionnement, sans regret… S’éloigner doucement de la terne médiocrité, de la triste laideur… Rejoindre ceux qui ont loué, célébré, servi la Beauté sans relâche, avec joie et ferveur, les rejoindre et se fondre en eux… Je le sais, ils sont là, ils m’attendent, ils m’ouvrent les bras et m’emporteront dans le scintillement coloré… Je leur parle en silence, ils m’écoutent, me bercent et me consolent. Ils sont mes amis de toujours et à jamais fidèles…

     

    Pourrai-je encore longtemps résister au doux chant des sirènes ?

    Saurai-je détourner mon regard de la belle lumière primordiale, et ma bouche de la coupe délicieuse ?

    A toujours remettre cet instant d’ineffable bonheur, la foi, l’espoir viennent à s’user… les images tremblantes de mes amis s’éloignent, s’estompent… Mes amis, mes amis, mes frères, agrippez moi, tirez-moi vers vous avant que la nuit ne devienne trop noire, donnez-moi bien à voir le jaillissement de la lumière, de la ligne idéale, et de la forme parfaite, donnez-moi bien à entendre la musique enjôleuse et tendre, donnez-moi bien à sentir la caresse du vent et de la pluie d’étoiles, et le parfum suave des mimosas …

    eva (copyright 2008©)

     

     

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  • Commentaires

    37
    Mardi 3 Juillet 2012 à 09:39

    C'est toujours difficile de n'être pas tenté de "retailler ses rêves"... Résister à cette tentation-là contraint à vivre en solitaire... Il faut choisir entre la triviale convivialité ou la luminescente solitude...

    36
    Lundi 2 Juillet 2012 à 15:33
    Avoir toujours des rêves plus grands que soi, et surtout ne pas les retailler à la mesure de qui que ce soit.
    35
    Mardi 26 Juin 2012 à 08:47
    34
    DAN
    Lundi 25 Juin 2012 à 18:36
    Bon ça va, c'est écrit en 2008 et tu es toujours là OUF....
    33
    Lundi 20 Juin 2011 à 08:54

    Quand les sirènes sont trop douces, je cours visiter ta collection de fleurs magnifiques ! Bonne semaine Philippe...

    32
    Dimanche 19 Juin 2011 à 06:00
    Quand on s'est rencontrés, je t'ai suivie dans la rue.
    Aujourd'hui je te suis dans cet Eden que tu décris mais t'en arracherai dès que les sirènes se feront entendre.
    31
    Samedi 18 Juin 2011 à 16:27

    Tu sais bien que c'est un vieux texte... 

    30
    Samedi 18 Juin 2011 à 16:11
    ailleurs .. c'est autre part
    29
    Samedi 18 Juin 2011 à 14:49
    Basta Eva !
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    28
    Vendredi 17 Juin 2011 à 23:01

    Ailleurs n'est ni un ami, ni un ennemi, ailleurs est un mirage...

    27
    Vendredi 17 Juin 2011 à 19:49

    oui... ne pas obéir au vertige...

    26
    Vendredi 17 Juin 2011 à 19:34

    oui, je sais Alain, je comprends...

    25
    Vendredi 17 Juin 2011 à 15:40
    Texte qui n'a pas pris une ride Eva. Toujours très beau. Bises et bonne fin de journée. Dominique
    24
    Vendredi 17 Juin 2011 à 08:57
    Superbe texte,bon vendredi,babsy.
    23
    DAN
    Vendredi 17 Juin 2011 à 08:45
    Moi je ne sais pas exprimer ces "ailleurs" je sais que j'en reviens depuis plus de 50 ans, ensuite je l'ai cherché partout cet ailleurs pour me rendre compte qu'il était en moi et qu'il m'attendait patiemment, il m'est de plus en plus familier et je sais que ce n'est pas un ennemi contrairement à ce que l'on pourrait croire, il est comme la pendula au salon qui dit oui qui dit non, mais qui nous attends....
    22
    Vendredi 17 Juin 2011 à 07:30
    Les voyages sont toujours prometteurs de désillusions pour qui a des rêves plus grands que lui-même, comme je me plais souvent à le dire, la tromperie des ailleurs c'est que, dès lors qu'ils sont atteints, ils deviennent des ici.
    Le rêve ne supporte ni la banalité ni la trivilialité, autrement dit le quotidien.
    L'amour total se brise sur la pierre dure du contingent, Albert Cohen l'a dit de façon ultime dans ce chef d'oeuvre qu'est "Belle du Seigneur"
    Accepter.
    Si la Beauté nous échappe, sachons en voler des reflets dans les beautés naturelles qui nous sont offertes, du brin d'herbe perlé de rosée à la magnificence des montagnes qui barrent l'horizon ou d'un océan qui se noie dans cet horizon, et aussi dans les témoignages de l'homme en oeuvres d'artisanat ou d'art et surtout dans l'approche de l'infini que peuvent être un sourire ou quelque marque de sensibilité et d'amour que ce soit.
    Alors Eva, cueille comme un don de la vie, comme un signe de l'ineffable, l'amitié qui sourd ici, ou au détour d'un chemin ou autour d'une table familiale ou de proches de coeur.
    Ne pas obéir au vertige de ce qui n'est peut-être pas et savoir lire l'immense dans quelques éclats de nos tristes finitudes.
    Je te dis cela parce que, encore une fois, ce que tu dis avec des mots différents des miens sont l'expression d'une gémellité profonde.
    21
    Vendredi 17 Juin 2011 à 01:11
    Je bois tes paroles, d'autant que je me suis laissée prendre hier soir à ce désir d'échapper à la pesante loi de la force qui nous maintient cloués à une condition dont nous voudrions échapper.
    20
    Vendredi 17 Juin 2011 à 00:35
    AILLEURS... l'herbe semble toujours plus verte... ceux qui ont loué, célébré et servi la beauté par leurs oeuvres ont souvent connu des vies de misère, de maladie, de manque d'amour, car la souffrance est la plus belle source d'inspiration. Ailleurs n'est qu'un mirage: tout ce que la vie nous donne vaut d'être vécu; même le plus douloureux.
    19
    Vendredi 17 Juin 2011 à 00:25
    Texte très beau et émouvant Eva, qui me touche beaucoup !
    Il contient effectivement cet ailleurs insaisissable qui nous appelle toujours...
    Amitiés,
    Alain MARC
    18
    Dimanche 21 Mars 2010 à 18:30

    "universelle parenté"... Grosses bises Alain, sur les chemins de la lumière...

    17
    Samedi 20 Mars 2010 à 23:48
    Non pas de hasard, Eva !
    Quant à mon commentaire il n'est long que par les apparences, en fait ce que j'exprime est très court ...
    Grosses bises,
    Alain MARC
    16
    Samedi 20 Mars 2010 à 19:12

    A l'instant même où tu écrivais ici un si long commentaire, j'en postais un sur ta page, un très court (probablement le plus court que je puisse écrire !). Hasard ?
    Merci beaucoup Alain. eva.

    15
    Samedi 20 Mars 2010 à 19:03
    Si, Dominique, ... il y a des choses qui nous retiennent, ou plutôt des êtres : ceux qui nous aiment et comptent sur nous !
    Alors sans doute s'ils sont ailleurs, il faut aller ailleurs ... Mais "ailleurs" est peut-être ici aussi .
    Pour ma part j'ai toujours trouvé une étrange contradiction entre cet "ailleurs" incomparable que je vais parfois chercher au plus profond des ténèbres de l'un de mes gouffres les plus chers (je veux parler de l'Aven Noir" dont l'exploration suit son cours) et la lumière retrouvée à chaque remontée, lumière nourricière mais liée aussi à un quotidien qui peut parfois sonner comme une servitude .
    Oui, je sais Eva, ce n'est pas tout à fait ton propos, ton "ailleurs" est autre, ton aspiration de lumière aussi . Mais les deux se rejoignent, symboliquement le paradoxe est le même et l'écho engendré par tes propos se prolonge comme une réminiscence au fond de chacun de nous ... Peut-être est-ce là le témoignage de quelque universelle parenté ?
    Alain MARC d'aquarelle-en-voyage.com
    14
    Samedi 20 Mars 2010 à 18:09

    je suis un chat sauvage...

    13
    Samedi 20 Mars 2010 à 18:06
    C'est effectivement ce que j'avais écrit tout en sachant très bien que rien ne nous retient.
    Vous retenir est de toute manière illusoire.
    Bisous et bon printemps.
    12
    Samedi 20 Mars 2010 à 18:00

    ce n'est pas ce que vous m'avez écrit dans votre premier com "je vous retiens eva, je vous retiens"... mais ne vous croyez pas obligé ! lol !

    11
    Samedi 20 Mars 2010 à 17:42
    Personne ne nous retient Eva...
    10
    Samedi 20 Mars 2010 à 16:02
    Un très joli texte qui fait vibrer une corde en nous.
    Combien de fois n'a-t-on envie d'aller vers cet ailleurs, de se laisser emporter et vivre autre chose.
    Mais la vie est là et souvent il faut faire avec ses bons et ses mauvais moments.
    Passe un agréable week-end.
    Bisous printaniers.
    Surfingmoune
    9
    Samedi 20 Mars 2010 à 14:10

    2008 lui n'est pas bien loin... et les portes du temps ne se referment pas comme celles des maisons... "Ailleurs" est doux et ensoleillé, calme et serein...
    "Ailleurs" est mon avenir, mon hâvre de paix...
    "Ailleurs" est intemporel...

    8
    Samedi 20 Mars 2010 à 14:07

    Certes, la vie est belle... Mais "ailleurs" est la perfection, la sérénité, la paix, la douceur...
    Vous ne me retiendrez que jusqu'au moment où je déciderai "qu'ailleurs" m'a aggripée fermement et me tire à lui...

    7
    Samedi 20 Mars 2010 à 13:48
    Un texte très émouvant et frais comme un printemps.
    Je te fais bisous

    clem
    6
    Samedi 20 Mars 2010 à 13:04
    Un très beau texte, écrit il y a longtemps, et Eva, tu as du faire du chemin depuis, ou bien ces sentiment sont-ils toujours d'actualité ?
    La photo montre un paysage doux et ensoleillé, où tu es allée chercher le bonheur quelquefois et sans doute le trouver depuis, mais nos états d'âme viennent et reviennent comme le flux et le reflux, le jour et la nuit... et nous poursuivent et nous rattrapent de temps à autre, pour nous quitter encore !
    Belle journée Eva
    5
    Samedi 20 Mars 2010 à 12:06
    J'ai bien envie d'ailleurs aussi,bon week-end,babsy
    4
    Samedi 20 Mars 2010 à 11:45
    Vous avez des accents pathétiques Eva. Oui la vie est aussi tièdeurs, compromissions, lachetés.Chacun d'entre nous le sais (pardonnez moi, mais votre constat n'est pas un scoop)ce qui n'empêche pas que la vie soit AUSSI belle et je vous retiens Eva, je vous retiens...
    3
    Samedi 20 Mars 2010 à 03:59
    Un texte comme un cri Eva, cet ailleurs de 2008 est-il toujours d'actualité ? Comme j'aimerais avoir le pouvoir de tirer vers la lumière !
    En tout cas , je te souhaite un tendre week-end.

    Caroline
    2
    Vendredi 19 Mars 2010 à 23:56
    Oui, la liberté des envies de ma vie depuis 50 ans est mon ailleurs !!
    Bon we à toi Eva.........
    1
    Vendredi 19 Mars 2010 à 23:48
    Tu es la dernière à qui je viens dire un petit au revoir avant de m'absenter quelques jours... j'ai bien fait, je vais aller ma coucher avec ton texte au fond des yeux, au fond de l'esprit... j'y penserai sûrement demain en m'envolant à cette légèreté, cette liberté dont tu parles. Bonne nuit et à bientôt.
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