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Eugenio Montale
S'il arrive que je doive vous perdre, que ce soit
sans mots, sans grondements,
portes claquées, de trains fuyants ;
mais que ce soit sur l'un
de nos chemins préférés,
solitaire, et que bien visible
un nimbe d'herbes sauvages couronne
au-delà des murs notre sort.
Sans autre bruit que peut-être les sons
qui concluent phases et mûrissements
de plantes et le déclin de leurs dépouilles :
murmures frémissements : halos
du giron du monde qui ne se montre pas.
Un bourgeon fusera d'un magnolia
ou une branche lourdement tombera ;
dès cet instant nous serons séparés.
Puis de cette heure de cauchemar,
ma précieuse fugitive, je saurai m'évader :
notre vie épouse une histoire
qui ne passe pas sans retour :
chaque nuit a son aubade.
Il est écrit que je dois vous perdre, je le sais ;
en vain l'abandonné regardera tout autour.
Je m'en irai solitaire ; quand un jour
vous me reviendrez dans un fracas de cascade.
Eugenio MONTALE
(traduit de l'Italien par Patrice Dyerval Angelini)
Celui qui écrivait dans ses "Carnets de Poésie":
« Certes,
nous sommes mieux que rien
nous qui restons dans le bégaiement »a trouvé dans le dessin un subterfuge habile pour sortir du balbutiement et même s’il n'en avait pas besoin (ses poèmes le prouvent !).
Ses dessins se font vagabonds et ouvrent son génie poétique à d’autres constellations – parfois infimes mais toujours dignes d’intérêt. Ce fut pour lui un autre moyen de gravir le chemin de la vie même lorsque l’eau passe sous les ponts et s’éloigne indifférente. Minutieux Montale garde un trait curieux et parfois plein d’humour. Il met toujours une distance juste entre lui et le monde : à savoir un regard aussi amusé que critique.
Où s’exprime par le trait sa main, s’éclaire le monde dans un ressac doux sonore. N’oublions pas en effet que Montale fut un aussi mélomane. Il trouva dans le dessin (comme dans ses textes) une musique silencieuse, un menuet de sensations qui s’amusent parfois d’un savoir encyclopédique. Le poète italien voulait qu’on prenne ses dessins pour des facéties. Il les a toutefois métamorphosés en images d’un monde qui tombe mais qu’un frôlement d’aile permet de s’élever. (Jean-Paul Gavard-Perret)
source : MONTALE ET LE DESSIN
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Commentaires
Merci Eva, un hommage à Montale qui me touche… Je trouve ses dessins délicieux, "…une musique silencieuse…".
Ce petit oiseau dans le dessin, s'appelle en Italien, Upupa, très présent dans la poésie de Montale...
Upupa, ilare uccello calunniato
dai poeti, che roti la tua cresta
sopra l'aereo stollo del pollaio
e come un finto gallo giri al vento;
nunzio primaverile, upupa, come
per te il tempo s'arresta,
non muore più il Febbraio,
come tutto di fuori si protende
al muover del tuo capo,
aligero folletto, e tu lo ignoriJ'aime beaucoup ta photo avec son premier plan ombragé, pour le texte j'ai oublié e prendre mon cachet d'aspirine (rire)
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Francesco, j'ai tout d'abord pensé que c'était un oiseau imaginaire, inventé par Montale... dans le Nord, on ne voit pas cet oiseau, il ne vit que dans le Sud... et il est vraiment comme Montale l'a dessiné ! et Upupa crie vraiment "Hup-hup-hup"... quelle merveille !
C'est un oiseau très timide, qu'on ne voit souvent qu'en vol. Portée par des ailes arrondies, son vol onduleux la fait ressembler davantage à un papillon géant qu'à un oiseau. Par contre au sol, elle demeure insaisissable et très difficile à découvrir à moins d'entendre son cri très particulier un « houp-houp-houp » trisyllabique sourd, perceptible de très loin. Sur le sol, elle dresse sa huppe fauve aux extrémités noires et déambule ensuite sur la pelouse en plongeant son long bec recourbé dans le sol.
http://www.oiseau-libre.net/Oiseaux/Especes/Huppe-fasciee.html