• L'ennui (Alberto Moravia 1907-1990)

    L'ennui (Alberto Moravia)

     

    "Toujours vêtue en petite danseuse, suivant la mode du moment, avec une légère chemisette bouffante et une jupe ample et courte que paraissait soutenir une crinoline, elle éveillait l'idée d'une fleur renversée, à la corolle déversée et oscillante, qui se serait promenée en marchant sur ses pistils. Elle avait un visage rond de petite fille, mais d'une petite fille grandie trop vite et initiée trop tôt aux expériences féminines. Elle était pâle, avec sous les pommettes une ombre légère qui faisait paraître ses joues hâves et, tout autour du visage une épaisse chevelure brune et crépelée. Sa petite bouche, de forme et d'expression enfantine, faisait penser à un bouton de fleur précocement apparu sur la branche sans s'ouvrir ; mais elle était marquée aux coins de deux rides minces qui me frappèrent particulièrement à cause du sentiment d'aridité intense qui en émanait. Enfin, ce qu'elle avait de plus beau, ses yeux, grands et sombres, eux aussi de forme enfantine sous un front un peu bombé, avaient un regard sans innocence, indéfinissablement distant, fuyant et incertain." 

    Alberto Moravia (L'ennui) 

     

     

     

    « Sidi Bou SaïdLes mots (M'naouar Smadah) »

  • Commentaires

    11
    Dimanche 8 Mars 2015 à 13:01

    Bonjour Eva, l'image va bien avec le texte. Merci pour ce partage. Gros bisous et bon dimanche

    10
    Lundi 2 Mars 2015 à 20:24

    J'aime beaucoup cet extrait  ! je ne connais pas cet auteur , je note ! envie de lire un de ses romans !

    Les fuschias , j'adore ! mais pas les maigres et blancs comme Françoise Hardy !

    Bisous Eva, merci, bonne soirée !

     

    9
    Lundi 2 Mars 2015 à 18:51

    @ Francesco : "les robes des femmes comme des cerf-volant"... c'est en écoutant sur BlowUp la chanson de Gian Maria Testa que je me suis souvenue de ce très beau portrait de "fleur renversée"...  mais j'avais oublié dans quel roman et j'ai dû relire avant "l'amour conjugal"... Oui, j'ai presque tout lu de Moravia. Et bien sûr j'ai vu comme tout le monde le film de Godard (mais je préfère le roman) et j'ai même la fameuse villa en photo sur l'île de Capri ! Mais je n'ai lu qu'un seul roman d'Elsa Morente... Merci Francesco  :-)

    8
    Lundi 2 Mars 2015 à 18:17

    Alberto (Pincherle) Moravia, sans doutes un des plus grands romanciers italiens du '900. "Les indifférents", "Les ambitions perdues", "Agostino", un roman très beau sur le thème de l'adolescence, "Le mépris" qui a inspiré le film de Godard, et puis bien sur, "L'ennui" que j'aime associer à la cinématographie de Antonioni, sur la thématique de l'incommutabilité.

    Un très beau billet, qui donne envie de lire, ou d'aller relire les romans de Moravia. Le choix de la musique est parfait!  

    7
    DAN
    Lundi 2 Mars 2015 à 17:58

    Ok j'ai lu !

    6
    Lundi 2 Mars 2015 à 14:33

    @ Henri-Pierre : C'est Moravia (dans ce portrait) qui m'a réconciliée avec mon physique de méditerranéenne : la mode était à la longiligne-androgyne Françoise Hardy avec ses cheveux plats et tristes, et je me désespérais alors de n'être pas dans les normes.... et j'ai lu Moravia (presque tous ses romans) et je me suis sentie aimée... Oui, les fuschias ! il en existe aussi qui ressemblent à Françoise Hardy : maigres et blancs... Il en existe tant et tant de variétés que je les collectionnais à une époque ! Ils aiment la mi-ombre et mon jardin les aimait aussi ! 

    5
    Lundi 2 Mars 2015 à 14:27

    @ Dan : à l'instant, Henri-Pierre te fait un résumé parfais de ce qu'est l'ambiance du roman

    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    4
    Lundi 2 Mars 2015 à 13:22
    Henri-Pierre

    Je me rappelle bien la lecture de ce livre, j'étais adolescent et évidemment troublé par cette sensualité vaporeus, évanescente et la rudesse sans pitié du regard qui scrute et décèle dans les détails les mensonges qui ramènent à la réalité crue. Les mêmes fleurs (des fuschias ?) poussaient d'abondance dans le jardin de ma grand'mère et, comme pour tout le monde je pense, évoquaient des petites ballerines sans tête, leur corps s'arrêtant au-dessus du corset.
    Merci de tant de nostalgie.

    3
    DAN
    Lundi 2 Mars 2015 à 11:59

    Oui mais là n'ayant qu'un extrait difficile de juger autrement !

    2
    Lundi 2 Mars 2015 à 10:50

    Bonjour Dan ! C'est amusant ce que tu me dis là, parce que ce portrait écrit par Moravia (que j'adore) ne donne pas du tout une idée du roman dont il est extrait : dans les romans de Moravia, il ne se passe généralement rien, et tu chercherais du début jusqu'à la fin "où il veut en venir"...  mais c'est ce que j'aime chez Moravia...

    1
    DAN
    Lundi 2 Mars 2015 à 10:44

    J'aime bien ce texte il est clair et poétique, ce qu'il raconte est facilement imaginable, on a tout de suite l'image en tête et l'on ne cherche pas à savoir où l'écrivain veut en venir !  yes

     

     

     

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :