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L'étranger (Armand Robin)
"Je ne suis qu'apparemment ici.
Loin de ces jours que je vous ai donnés
Est projetée ma vie.
Malhabile conquérant par mes cris gouvernés,
Où vous m'apercevez, je ne suis qu'un étranger !
Gestes d'amour partout éparpillés,
Je me fraye une voie isolée, désertée.
D'une science à l'autre j'ai pris terrier,
Lièvre apeuré sentant sur lui braqué
Le fusil savant et sûr de la destinée.
Aucune terreur ne m'a manqué."
Armand Robin.
Armand... Armand ! au nom d’ici, au visage d’ici, au langage d’ailleurs…
A t’excuser toujours de vivre, de ne point souffrir assez, de chercher les mots qui te fuient,
A regarder les autres défiler, à les écouter vociférer, à voir les trains passer…
A ne point suivre le troupeau, mais prendre les chemins de traverse,
A ne plus boire aux fontaines ni aux bouches trompeuses,
A ne plus croire en rien, à ne plus avoir faim,
Tu t’es perdu, et je t’ai trouvé enfin…
eva, 13 juin 2016
photo Katia Chausheva ici
Tags : Poésie, photographie, mots
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Commentaires
Armand Robin est un vieux compagnon que j'ai rencontré dans une anthologie de Pierre Seghers parue en 1972 (Oups ! J'avais 17 ans, inutile de faire le calcul...). Le poème de ton billet y figure. Je suis toujours aussi ému par "J'ai choisi pour me bâtir d'être partout détruit".
Bon, je respire un grand coup et vais lire un Astèrix. Bonne journée Eva
J'aime beaucoup ton billet Eva et ta façon d'interpeller le poète est encore poésie.
Comme le temps est à la lecture, j'avais une revue de poésie dans les mains, et suis tombée sur ces mots de Franck Venaille "Être poète, c'est croire à l'intensité du langage, à ses méandres, ses contre-pieds, ses contradictions et sa générosité également... Être poète ce n'est pas seulement écrire - vers ou proses - des poèmes, c'est donner à notre douleur la force et les moyens de se dépasser, de devenir ainsi la douleur de tous, y compris de la poésie elle-même." Bonne journée à toi !
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Lundi 13 Juin 2016 à 13:33
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Si l'humanité entière était convaincue de la part d'étranger qu'il y a, inexorablement, en chacun de nous, le monde serait aussi beau que ces paroles et le personnage qui l'illustre.
hélas, hélas Henri-Pierre !... trop de gens renient la part d'étranger qu'ils portent en eux...