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Madrid (Musée du Prado)
Hommage à Francisco Goya (Tres de Mayo) et Boris Vian (Le Temps de vivre)
Il a dévalé la colline
Ses pas faisaient rouler des pierres
Là-haut entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie
Il respirait l'odeur des arbres
Il respirait de tout son corps
La lumière l'accompagnait
Et lui faisait danser son ombre
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
Les canons d'acier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Il est arrivé près de l'eau
Il y a plongé son visage
Il riait de joie il a bu
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Il s'est relevé pour sauter
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
L'a foudroyé sur l'autre rive
Le sang et l'eau se sont mêlés
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
Le temps de rire aux assassins
Le temps d'atteindre l'autre rive
Le temps de courir vers la femme
Il avait eu le temps de vivre.
Boris Vian
Le temps de vivre
Tres de Mayo Francisco Goya
Tags : poésie, peintres
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Commentaires
Je comprends tout ce que tu me dis, parce que pour moi, c'est un peu la même chose par personne interposée (mon mari)... j'ai voulu exprimer cela ici :
http://eva.baila.over-blog.com/article-l-ecole-62151140.html
Je te remercie pour cet échange tellement riche d'émotions... Bises Laura...
Quel plaisir de te voir ici M'Bark, Goya et Boris Vian ont embrassé la même cause contre les guerres stupides, vaines et criminelles. Ce poème de Vian est moins connu que la célèbre lettre, c'est pourquoi je l'ai choisi pour accompagner ce tableau (j'espère que tu as cliqué sur le lien en bas de page !) je te remercie pour ton poème, et je t'envoie un mail pour te faire une proposition (honnête !!!)
eva.Salut ma chère EVA Quel génie de réunir Goya et Boris Vian ! Accepte que je me fasse tout petit à coté de ces deux monuments avec mon petit poème : LE TEMPS DE VIVRE °°°°°°°°°°LE TEMPS DE VIVRE°°°°°°°°°°° la ville fourmilière écarquille ses yeux Sur le seuil, un rituel banal Sur le seuil, des bises bancales Nous voilà lâchés dans la jungle. Papa et maman abonnés à la célérité Se jettent dans la gueule métro-boulot Se jettent sous le joug des fardeaux Maman m'embrasse aux escaliers de l'indifférence. J'ignore la couleur des yeux Toujours pressée , ma mère Toujours fuyant, mon père Nous voilà ombres rances de Sisyphe. Et lentement, le temps ironise Sur fond de vie cadenassée Sur fond de désirs simulacres Nous n'avons pas pris le temps de vivre. M'Bark El Maghfour Toute mon amitié EVA
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Par ailleurs, je viens de te parler de poésie; les enfants, dès l'âge de 8 ans, sentent ou comprennent le message de Boris Vian et l'apprennent par coeur, le disent (et non le récitent).
Associé à des lectures d'oeuvres picturales comme celle de Goya, ils -les élèves- écrivent des textes extraordinaires ( bourrés de fautes: pas grave).... Grâce à toi, des souvenirs radieux remontent.
Merci, chère Eva.