-
"Oedipe Roi" de Pasolini
Deux cinéastes ont émergé du mouvement « néoréaliste » qui a prospéré dans l’Italie d’après-guerre : Antonioni et Pasolini.
Œdipe Roi est l’un des films « culte » de Pasolini. Il revisite la légende d’Œdipe, roi de Thèbes, entourée d’un prologue sur l’enfance de Pasolini, et d’un épilogue situé en 1967 à Bologne. A partir de l’une des histoires les plus archétypales, le cinéaste, a su illustrer un conflit plus humain et plus universel que le récit mythologique lui-même. L’éclatement des époques antiques et contemporaines, brisures entremêlées d’évènements autobiographiques, augmentent encore cette intensité dramatique originelle.
« Dans mes films » disait Pasolini, « Il n’y a pas de plans-généraux mis ensemble, il n’y a jamais montage d’un plan-général avec un autre plan-général, caractéristique d’un film néoréaliste typique. Il y a prédominance des gros-plans, gros-plans frontaux, pas en fonction de l’efficacité expressive, mais en fonction de la sacralité. La caractéristique de cette forme idéologique, c’est le désespoir. »
La caméra colle au plus près des visages qui s’agitent dans leur quête inutile d’échapper au destin. Cette proximité insistante rentre dans un rapport d’opposition particulièrement poétique avec les longs plans contemplatifs des cités et des traditions anciennes. Pasolini use d’une caméra portée, et joue sur l’aspect baroque et lyrique haut en couleurs. Le choix des accessoires (robes, costumes, armures, masques) le choix des décors, des paysages, l’expression figée des visages, tout est d’une intensité inhabituelle à ce qui est attendu de la mythologie grecque, tout est marqué pour appartenir à une époque hors du temps, hors de la géographie réelle…
Par exemple, lorsque Œdipe visite l’oracle de Delphe, il n’y a pas de « panoramique » sur une structure de marbre orné comme on l’attend dans un film hollywoodien…Non, Pasolini nous montre une congrégation de villageois recueillis dans une clairière devant un bosquet d’arbres, l’oracle est une vieille femme effrayante entourée de frêles garçons masqués…
Les routes sont poussiéreuses, rubans interminables abandonnés par les dieux distraits… Un village berbère du Maroc, tel qu’on peut le photographier encore dans la région de Ouarzazate, figure l’ancienne Thèbes… Le caractère extraordinaire des décors, des danses, des mélopées stridentes, vont au-delà des limites héritées du réel…
C’est un monde de la divinité, de la croyance aveugle… où les aveugles mêmes acceptent la face la plus abominable de la vérité.
« La vérité n’est pas dans un seul rêve, mais dans beaucoup de rêves. » Pier Paolo Pasolini
lire aussi : http://www.iletaitunefoislecinema.com/memoire/2134/pasolini-et-lalternative-mystique
-
Commentaires
J'ai eu un peu de mal à trouver les commentaires un peu dérouté par ton (beau) nouveau blog !
Mais voilà toujours autant de plaisir à te lire (enfin pas facile car mon (vieil) écran est très sombre et pas réglable, continue à publier tes intéressants (et poétiques) billets !
Amitiés,
Merci Francesco ! Non je n'ai pas encore vu Medea,mais maintenant que j'ai un peu de temps pour moi, je vais essayer de me faire plaisir... J'ignorais que Pasolini avait aimé La Callas, mais je peux l'imaginer, Maria Callas est une figure mythique elle-même, une sorte de femme très inaccessible, et je pense que c'est cela qui a dû lui plaire... Oui la video de la dernière interview est troublante, il savait qu'il était en grand danger, il pressentait qu'il allait mourir de cette façon abominable en raison de son engagement, ça me touche beaucoup parce qu'il est très calme et très lucide dans cette interview, et en même temps, cela ressemble à de la provocation, ou plutôt une attitude ordalique : il va au devant de son destin, comme les héros qu'il aimait représenter...
Merci Eva de ce merveilleux hommage à PPP, ton hommage est touchant, la dernière interview de PPP est troublante…. encore un grand merci de ces émotions que tu nous donne…
As tu vu Médéa? avec Maria Callas, qui a été le grand amour de PPP...
Un film culte....que je n'ai pas vu !!
Superbe billet Eva , photos magnifiques !
Un dvd à trouver....merci , je t'embrasse
On m'a prêté le dvd version française... et le bonus éclaire beaucoup ce qui peut sembler obscur. Je crois même que tu peux voir la version intégrale sur le net... Je vais chercher pour toi, je te le dis par mail... Bonne nuit Dan
Je l'ai vu il y a fort longtemps , je devais avoir 10 ou 11 ans et à l'époque je n'avais rien compris moi qui m'attendais plutôt à voir un péplum, mais bon aujourd'hui je le reverrai avec plaisir pour peu qu'il passe la version Française !
Bonne nuit Éva !J'ai adoré re-visiter en ta compagnie ces paysages familiers!
Bonne fin de soirée chal-heureuse!
J'ai choisi ces photos, parce qu'elles ont été prises exactement dans les mêmes lieux de tournage de ce film magique ! Si tu peux voir le film une fois, je suis certaine qu'il te plaira... enfin, il "t'arrachera le coeur" comme il a arraché le mien... Bonne journée Nathanaël, et merci de ta visite...
Rien que les photo, déjà ce dépaysement ! Ça arrache notre cœur d'ici, l'emporte dans cet ailleurs et voilà que se réveillent les étoiles dans le néant. Bonjour Eva. Et puis cette VO italienne qui elle aussi m'emporte dans cette adolescence lorsque tard le soir passaient ces films italiens aux chants étrangers, les soirs d'été. Merci Eva.
Ajouter un commentaire
oh je suis désolée Alain pour les difficultés à lire le texte... J'ai deux ordi dont un avec un écran ancien, et je n'avais pas perçu ce problème... Merci de ta visite, bon dimanche à toi.