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    Aurore

     

     

    Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.

    Tu réclamais le soir ; il descend ; le voici :

    Une atmosphère obscure enveloppe la ville,

    Aux uns portant la paix, aux autres le souci.

     

    Pendant que des mortels la multitude vile,

    Sous le front du Plaisir, ce bourreau sans merci,

    Va cueillir des remords dans la fête servile,

    Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici,

     

    Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes Années,

    Sur les balcons du ciel, en robes surannées ;

    Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;

     

    Le Soleil moribond s'endormir sous une arche,

    Et, comme un long linceul traînant à l'Orient,

    Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.

     

    Charles Baudelaire (Nouvelles fleurs du Mal) 



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    "Je suis descendu au café de Monsieur Driss en bas et je m'assis en face de Monsieur Hamil qui était marchand de tapis ambulant en France et qui a tout vu. Monsieur Hamil a de beaux yeux qui font du bien autour de lui. Il était déjà très vieux quand je l'ai connu et depuis il n'a fait que vieillir.

    - Monsieur Hamil, pourquoi vous avez toujours le sourire ?

    - Je remercie ainsi Dieu chaque jour pour ma bonne mémoire, mon petit Momo.

    Je m'appelle Mohammed mais tout le monde m'appelle Momo pour faire plus petit.

    - Il y a soixante ans, quand j'étais jeune, j'ai rencontré une jeune femme qui m'a aimé et que j'ai aimée aussi ; ça a duré huit mois, après, elle a changé de maison, et je m'en souviens encore, soixante ans après. Je lui disais : je ne t'oublierai pas. Les années passaient, je ne l'oubliais pas. J'avais parfois peur car j'avais encore beaucoup de vie devant moi et quelle parole pouvais-je donner à moi-même, moi, pauvre homme, alors que c'est Dieu qui tient la gomme à effacer ? Mais maintenant, je suis tranquille. Je ne vais pas oublier Djamila. Il me reste très peu de temps, je vais mourir avant.

    J'ai pensé à Madame Rosa, j'ai hésité un peu et puis j'ai demandé :

    - Monsieur Hamil, est-ce qu'on peut vivre sans amour ?

    Il n'a pas répondu. Il but un peu de thé de menthe qui est bon pour la santé. Monsieur Hamil portait toujours une jellaba grise, depuis quelque temps, pour ne pas être surpris en veston s'il était appelé. Il m'a regardé et a observé le silence.

    - Monsieur Hamil, pourquoi ne me répondez-vous pas ?

    - Tu es bien jeune et quand on est très jeune, il y a des choses qu'il vaut mieux ne pas savoir.

    - Monsieur Hamil, est-ce qu'on peut vivre sans amour ?

    - Oui, dit-il, et il baissa la tête comme s'il avait honte.

    Je me suis mis à pleurer."

                                                                                                                             Emile Ajar (La vie devant soi)

    photo Flickr


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    Un très vieux perroquet...

     

    " Un très vieux perroquet vint lui porter ses graines de tournesol, et le soleil entra dans sa prison d'enfant"

                                                                (Jacques Prévert)


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    Paul Klee (Hammamet)

     

    Bleu, bleu si bleu de la Méditerranée,

    Bleu d'Hammamet, Bleu de Klee, 

    Je me languis du bleu

    Blue si doux, bleu

    si lumineux !

      Bleu

    !

     

    Bleu de Klee

     


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