• Le Minotaure, mythe revisité...

     

    Il n'est pas bien certain que Thésée soit l’auteur de la mort du Minotaure…

    Il n’est pas vraiment certain que le Minotaure ait péri sous le glaive de Thésée,

    Il n'est pas certain que le Minotaure soit mort...

    Le Minotaure n'est pas mort !

    Lassé des jeux de l’amour, le Minotaure dort au fond du labyrinthe…indifférent à toutes celles qui s’offrent désormais… trop jeunes, trop vieilles, trop grosses, trop maigres, pas assez drôles, pas assez joyeuses, ou trop pragmatiques, trop distantes ou trop lubriques...

    Après les avoir toutes aimées jusqu’à la dévoration, il s’en détourne avec lassitude.

    Le pauvre Minotaure se morfond et réinvente Ariane désormais abandonnée par Thésée… Ariane s’est pris les pieds dans son fil rouge, Ariane songe à cette force étrange qui murmurait encore hier à son oreille, et dont les mots mystérieux continuent à la subjuguer au plus profond de sa nuit… Des mots confus, tout en même temps poison et contre-poison… seules joies surgissant comme des lucioles dans un jardin crépusculaire.

    eva, le 31 août 2023

     

     


    3 commentaires
  •  

    The_Nightwatch_by_Rembrandt_-_Rijksmuseum.jpg

     

    "Un tableau célèbre de Rembrandt, qui est au musée d'Amsterdam nous fera peut-être comprendre la fonction de l'aventure. Dans La Ronde de Nuit, en bas et à droite du tabeau, et surgissant des ténèbres où la scène est presque entièrement plongée, il y a un homme vêtu de jaune. Que signifie cet homme d'or dont a parlé en termes admirables un poète contemporain ?

     

    Nous ne nous hasarderons pas à le dire. Mais il sera beau de penser que cet homme d'or est le principe de l'aventure. Dans l'obscurité de la nuit, l'homme introduit de la lumière. Le clair-obscur n'est-il pas l'éclairage ambigu de la démarche aventureuse ? Attirée par la certitude incertaine de l'avenir et de la mort, l'aventure, disions-nous, est à la fois close et ouverte : elle est donc entr'ouverte, comme cette forme informe, cette forme sans forme qu'on appelle la vie humaine ; car la vie de l'homme fermée par la mort, reste entrebaillée par l'ajournement indéfini de la mort. Pour celui qui est dedans, l'immanence signifie le sérieux, l'absence de forme, la clôture intestinale, la certitude de mourir ; mais pour le joueur, l'existence demeure ouverte, et les formes filles du libre arbitre, allègent la fatalité compacte. Ouverte et fermée, claire et obscure, telle apparaît la vie quand on est à la fois dedans et dehors. A la ronde qui tourne dans les ténèbres de la nuit sans déboucher nulle part, l'homme de lumière, l'Ulysse des temps modernes désigne l'ouverture : et ce n'est qu'une entr'ouverture. Mais cette entr'ouverture nous donne déjà une entrevision de l'infini. Le cercle est donc brisé. L'homme de lumière, c'est le principe du temps qui indique à la ronde nocturne le chemin de l'aurore."

     

    Vladimir Jankélévitch. (Philosophie morale) 


    11 commentaires




  •   (Illustration : La Grande Odalisque huile sur toile 91 x 162cm Paris Musée du Louvre)


    "Soulevée à demi sur son coude noyé dans les coussins, l’odalisque, tournant la tête vers le spectateur par une flexion pleine de grâce, montre des épaules d’une blancheur dorée, un dos où court dans la chair souple une délicieuse ligne serpentine, des reins et des jambes d’une suavité de forme idéale, des pieds dont la plante n’a jamais foulé que les tapis de Smyrne et les marches d’albâtre oriental des piscines du harem ; des pieds dont les doigts, vus, par-dessous, se recourbent mollement, frais et blancs comme des boutons de camellia, et semblent modelés sur quelque ivoire de Phidias retrouvé par miracle ; l’autre bras languissamment abandonné, flotte le long du contour des hanches, retenant de la main un éventail de plumes qui s’échappe, en s’écartant assez du corps pour laisser voir un sein vierge d’une coupe exquise, sein de Vénus grecque, sculptée par Cléomène pour le temple de Chypre et transportée dans le sérail du padischah.


    Une espèce de turban de cachemire, arrangé avec un goût extrême, et dont les franges retombent derrière la nuque, enveloppe le sommet de la tête, découvrant des cheveux en bandeaux sur lesquels s’enroule une natte de cheveux en forme de couronne : des fils et des grappes de perles complètent cette coiffure orientale.

    Les yeux dont la prunelle glauque regarde de côté ; le nez, aux narines roses comme l’intérieur d’un coquillage ; la bouche, épanouie par un sourire nonchalant ; les joues pleines, un peu larges ; le menton, d’une courbe ronde et voluptueuse forment un type où l’indvidualité de l’Orient se mêle à l’idéal de la Grèce. – C’est bien là, et telle a dû être l’intention du peintre, la beauté esclave dans sa sérénité morne, étalant avec indifférence des trésors qui ne lui appartiennent plus, et se reposant nue au sortir de son bain, dont les dernières perles sont à peine séchées, à côté de la cassolette qui fume, entre le chibouck et la collation de fruits et de conserves, ne prenant pas même la peine de renouer sa ceinture à la massive agrafe de diamants.

    Quelle élégance abandonnée dans ses longs membres qui filent comme des tiges de fleurs au courant de l’eau ! Quelle souplesse dans ces reins moelleux, dont la chair semble venir des micas de marbre de Paros, sous la vapeur rose de la vie qui les colore légèrement ! Et quel soin précieux dans tous les accessoires, les bracelets, le chasse-mouches en plumes de paon, les bijoux, la pipe, les draperies, les coussins, les linges fripés et jetés çà et là."                                       

    Théophile Gautier 
    (Extrait de "Ecrire la peinture - de Diderot à Sollers" Pascal Dethurens Edition Citadelles & Mazenod) Editeur Citadelles & Mazenod

     


    13 commentaires

  • La mort de Sardanapale, Eugène Delacroix
    (1827) Huile sur toile 3.92 x 4.96 (Musée du Louvre)


    oeuvre ainsi commentée par Charles Baudelaire : 

    "...Bien des fois, mes rêves se sont remplis des formes magnifiques qui s'agitent dans ce vaste tableau, merveilleux lui-même comme un rêve. Le Sardanapale revu, c'est la jeunesse retrouvée. A quelle distance en arrière nous rejette la contemplation de cette toile ![...] Une figure peinte donna-t-elle jamais une idée plus vaste du despote asiatique que ce Sardanapale à la barbe noire et tressée, qui meurt sur son bûcher, drapé dans ses mousselines avec une attitude de femme ? Et tout ce harem de beautés si éclatantes, qui pourrait le peindre aujourd'hui avec ce feu, avec cette fraîcheur, avec cet enthousiasme poétique ? Et tout ce luxe sardanapalesque qui scintille dans l'ameublement, dans les vêtements, dans les harnais, dans la vaisselle et la bijouterie, qui ? qui ?"

    (Extrait de "Ecrire la peinture - de Diderot à Sollers" Pascal Dethurens Edition Citadelles & Mazenod) 



    10 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique