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Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !
Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormant dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !
La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.
....
Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse
Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ;
Et mon esprit subtil que le roulis caresse
Saura vous retrouver, ô féconde paresse,
Infinis bercements du loisir embaumé !
....
Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde
Sèmera le rubis, la perle et le saphir,
Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde !
N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde
Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?
Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
Illustration : Dante Gabriel Rossetti (Monna Vanna)
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Les Hiboux
Sous les ifs noirs qui les abritent,
Les hiboux se tiennent rangés,
Ainsi que des dieux étrangers,
Dardant leur oeil rouge. Ils méditent,
Sans remuer ils se tiendront
Jusqu'à l'heure mélancolique
Où poussant le soleil oblique,
Les ténèbres s'établiront.
Leur attitude au sage enseigne
Qu'il faut en ce monde qu'il craigne
Le tumulte et le mouvement,
L'homme ivre d'une ombre qui passe
Porte toujours le châtiment
D'avoir voulu changer de place.
Charles Baudelaire
(photo eva : El Djem, Tunisie, mai 2008 © )
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Lorsque les dernières fleurs seront fanées dans ton jardin, les plus somptueuses, les plus parfumées, les plus vaniteuses, les plus arrogantes, il te restera les petites étoiles du jasmin d’hiver, les timides, les discrètes, les tenaces, les fidèles, qui s’accrochent obstinément au mur de ta maison, et qui te saluent les matins d’hiver quand tu ouvres les volets…
photos eva
eva, le 27 novembre 2009
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L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée...
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou...
Et tu me diras : "Cherche ! " en inclinant la tête,
- Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
- Qui voyage beaucoup...
Arthur Rimbaud (En wagon, le 7 octobre 1870)
photo eva ©
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