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Par eva-maïa le 12 Octobre 2008 à 11:01
Hommage à Francisco Goya (Tres de Mayo) et Boris Vian (Le Temps de vivre)
Il a dévalé la colline
Ses pas faisaient rouler des pierres
Là-haut entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie
Il respirait l'odeur des arbres
Il respirait de tout son corps
La lumière l'accompagnait
Et lui faisait danser son ombre
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
Les canons d'acier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Il est arrivé près de l'eau
Il y a plongé son visage
Il riait de joie il a bu
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Il s'est relevé pour sauter
Pourvu qu'ils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
L'a foudroyé sur l'autre rive
Le sang et l'eau se sont mêlés
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
Le temps de rire aux assassins
Le temps d'atteindre l'autre rive
Le temps de courir vers la femme
Il avait eu le temps de vivre.
Boris Vian
Le temps de vivre
Tres de Mayo Francisco Goya
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Par eva-maïa le 20 Septembre 2008 à 07:30
Dans les caveaux d'insondable tristesse
Où le destin m'a déjà relégué ;
Où jamais n'entre un rayon rose et gai ;
Où seul avec la nuit, maussade hôtesse,
Je suis comme un peintre qu'un Dieu moqueur
Condamne à peindre, hélas ! sur les ténèbres
Où, cuisinier aux appétits funèbres,
Je fais bouillir et je mange mon coeur,
Par instants brille, et s'allonge, et s'étale
Un spectre fait de grâce et de splendeur.
A sa rêveuse allure orientale,
Quand il atteint sa totale grandeur,
Je reconnais ma belle visiteuse :
C'est Elle ! noire et pourtant lumineuse.
Charles Baudelaire (Spleen et Idéal)
photo eva baila (Rome, cloître de St Paul hors les murs) ©
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Par eva-maïa le 13 Septembre 2008 à 09:00
"Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu vive clarté de nos étés trop courts !
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.
Tout l'hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frisson, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.
J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd,
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.
Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? - C'était hier l'été ; voici l'automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ."
Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
photo eva baila (copyright 2008)
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